Algérie : Pourquoi Atmane Mazouz, actuel président du RCD ne veut pas relever la tête ?

Le 10 mai 2025 à Montréal, Atmane Mazouz, président du RCD, toujours flanqué de Mohand Arezki Hamdous, faisait face à une salle clairsemée mais remontée. Une conférence sans thème affiché, un discours sans colonne vertébrale, des explications sans cohérence.

Refus d’expliquer et d’assumer

Les questions posées ? Toujours les mêmes. Celles qui hantent la base militante du RCD depuis des années, et qui avaient déjà été martelées lors de sa rencontre de décembre 2024 à Paris :

Le RCD est-il toujours un parti laïc ? Pourquoi avoir signé une feuille de route avec Rachad ? Pourquoi avoir effacé Saïd Sadi du site officiel ? Où sont passées les archives du parti ?

Des vidéos relayées sur les réseaux sociaux témoignent de ces échanges. Et face aux interpellations légitimes d’anciens responsables dont certains étaient de la promotion de Mazouz, les réponses de ce dernier ont oscillé entre le flou, l’esquive et l’aveu gêné.

Oui, il rencontre des officiers supérieurs — normal pour un dirigeant politique — mais moins banal et plus surprenante est cet appel qu’il lance ensuite à la diaspora : rapprochez-vous des consulats et des ambassades. Des institutions qui signalent à Alger le moindre propos contestataire des émigrés qui sont cueillis à l’aéroport. En quelques phrases, le discours bascule. Le ton rappelle plus les prêches du FLN que l’esprit de rupture sur lequel s’est construit le RCD.

Élu de justesse en 2022 face à Mourad Biatour, candidat de Mohcine Belabbas,  Atmane Mazouz, bien qu’étant le numéro 2 de ce dernier, pouvait selon certains observateurs, prétendre à représenter un espoir de rupture. On le disait homme de consensus, redresseur potentiel d’un parti affaibli par les compromissions avec les islamistes. On attendait qu’il se démarque de la feuille de route de Mourand Dhina qui avait rapporté le RCD comme un trophée de guerre. Les attentes furent déçues. Pas un mot sur la trahison de son prédécesseur qui avait provoqué la démission de plus de deux cents cadres du parti : une saignée dont le RCD ne se remettra jamais.

Les arguments pour justifier son silence devant l’abandon des principes du RCD au profit des islamistes sont variables et désolants. La feuille de route était en fait une pétition en ligne, ce qui est faux : seuls neuf personnes l’ont signée. Je n’étais pas très au courant. Peu convaincant ; il était secrétaire national et il n’a pas condamné la dérive comme le firent d’autres cadres…. Pour les archives il prétend qu’il ne savait rien et puisqu’elles avaient été détruites avant sa prise de fonction. Oui mais pourquoi avoir refusé une commission d’enquête indépendante pour situer les responsabilités et déterminer les raisons de ce crime ? 

Trois ans plus tard, le constat est sans appel :

Le RCD est l’ombre de lui-même. Ni dans la qualité de son discours, ni la structuration de ses instances ni les productions politiques n’ont pu être retrouvées. Loin de relancer une dynamique politique, Mazouz semble résigné à gérer un parti réduit à un label électoral qui permettra d’établir des listes sans avoir à recueillir les signatures de citoyens nécessaires à la validation des candidatures. Triste fin.

Un appel au rassemblement… saboté en interne par un ancien militant …de l’UDR

En décembre 2024, Mazouz lance un appel au rassemblement des forces démocratiques. Une initiative saluée par plusieurs figures, dont Yassine Aissiouane, qui exprime publiquement son soutien sous réserve d’ouvrir un débat transparent du sur le passif. L’initiative est tuée dans l’œuf. Le porte-parole du parti, Rachid Hassani, ferme la porte, traite les partisans de la ligne laïque d’« exclus » et de « putschistes ». A noter que cet individu, propulsé secrétaire à la communication, avait été un agent du parti de Benyounes UDR créé par la police politique.

Qu’en est-il de la vérité ? En 2021, après la signature de la feuille de route avec Rachad, 217 cadres du parti interpellent Belabbas pour s’être associé à une décision violant les statuts et ses principes du RCD. Faute de réponse, ils réclament un congrès extraordinaire — conformément aux statuts du parti. « Où est le putsch ? Le vrai coup de force, c’est de criminaliser la fidélité aux principes fondateurs du RCD, s’indigne un ancien militant très actif sur la toile. »

Vers l’extinction d’une lignée ?

Alors que la mouvance laïque se fragilise, que l’islamisme s’installe tranquillement au sommet de l’État, le RCD dérive, sans cap ni boussole. Ce parti, autrefois porteur d’un souffle intellectuel rare, d’un discours politique affûté, d’une vision claire, semble aujourd’hui sombrer dans le bavardage creux, la posture molle, les contradictions internes et, plus grave, les compromissions dans des contacts secrets. Les dirigeant du FFS qui se sont eux aussi ralliés au pouvoir ont au moins pris la précaution de témoigner leur ralliement à un dirigeant politique. Pour sa part Mazouz préfère les rencontres occultes avec « les officiers supérieurs. »

Ce n’est plus un glissement. C’est une disparition programmée.

Les questions principales restent son réponses : pourquoi Mazouz n’ose-t-il pas libérer sa conscience devant un reniement idéologique et un crime qui a fait disparaitre la mémoire du RCD ? Pourquoi ne lance-t-il pas un appel aux anciens militants pour reconstituer ce patrimoine ? Jusqu’à quand va-t-il inventer des excuses changeantes à des actes injustifiables ?

Total
0
Shares
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *